Amsoria
Lilia Bongi
Après une préface qui nous explique clairement le titre on est absorbé par la lecture de ce livre autobiographique.
L’auteure est la fille d’un juriste aux idées avant-gardistes qui imposa la présence à l’école de ses enfants auprès de condisciples blancs dans les années cinquante.
Pour parfaire leur éducation scolaire il les envoie en Belgique et les confie à des couples belges.
C’est ainsi que notre écrivaine se retrouve à l’âge de dix ans dans une famille d’accueil qui nous rappelle à bien des égards les Thénardier de Victor Hugo. Quand le père apprend leur condition de vie il les place dans une autre famille, désireuse d’arrondir ses fins de mois par « l’éducation » de trois de ses filles. Ils lésinent sur les dépenses et exigent leur aide dans les tâches ménagères pour compenser les retards de paiements par le père.
Voulant revoir son frère et sa petite sœur dont on l’avait séparée, la famille l’emmène en visite dans l’institution qui les abrite. Tous sont épouvantés par l’aspect négligé de ces enfants. C’est là qu’on apprend que la famille a tout de même bon cœur puisqu’ils proposent de prendre également en charge ses petits frère et sœur.
Sa scolarité qui avait mal commencé auprès de la première famille d’accueil s’améliore et elle obtient à nouveau de beaux résultats comme avant son départ du Congo. Sans montrer un racisme net on sent un ostracisme de la part de ses condisciples et enseignants. Finalement c’est le sort qui était réservé à la plupart des petits Belges qui avaient été arrachés à leur Congo.
A douze ans je traînais encore mon accent flamand et, fils de colonial, on me traitait de fils de profiteur, ce n’était donc pas dû à la couleur de la peau. Comme elle j’ai fait du cours de français la branche où j’étais le plus motivé. Je suppose que c’est pour cela que son style et sa grammaire sont quasi parfaits. Je pense au laisser-aller des écrivains à succès d’aujourd’hui…
Elle rencontre également sur son chemin des personnes gentilles et admirables.
Une fois commencée sa lecture on ne lâche plus ce livre ; c’est la vie passionnante de quelqu’un qu’on a séparé, pour son bien, de ses racines et de sa maman chérie. N’ayant pas pu financer d’études universitaires elle a tout de même réussi sa vie, grâce à un acharnement et une intelligence de très haut niveau.
On garde longtemps l’émotion après avoir tourné la dernière page. Ce livre aurait pu être revanchard et être le support d’un règlement de comptes avec les embûches qui ont jalonné le parcours de Lilly, il ne l’est nullement. Je vais le garder précieusement dans ma bibliothèque.
Jos Ver Boven