« La carrière territoriale n’est pas un métier, mais un honneur et une mission»
Louis Franck, Ministre des Colonies.
Des administrateurs territoriaux se sont efforcés, tout au long des témoignages qui vous sont ici présentés, de décrire avec sincérité et objectivité, leurs nombreuses activités et leur motivation.
Leur étroite relation avec les populations locales, dont ils parlaient la langue et connaissaient les coutumes, est un reflet de l’idéal qui les animait.
Heureux malgré l’inconfort et l’éloignement de leur pays et de leurs proches, ils accomplissaient une tâche souvent ingrate, pour améliorer le bien-être de leurs administrés.
Veillant jour après jour à l’entretien des voies de communication, à l’hygiène des villages, à la bonne tenue des centres médicaux, au fonctionnement correct de la justice, au développement de cultures de subsistance d’abord et de cultures de rapport ensuite, ils ont contribué, avec l’aide des Congolais qu’ils formaient à ces tâches, à mener le Congo sur la voie du progrès, en y faisant régner la paix et la sécurité.
Ils expriment ici tout leur enthousiasme et leur attachement à ce beau pays et ses habitants.
Puisse leur témoignage aider le Congo actuel à renouer avec le progrès et à redevenir un pays où, pour tous, il fera bon vivre !
AU CONGO BELGE
L’Etat indépendant du Congo fondé par le roi Léopold II en 1885, vécut vingt-trois ans sous sa souveraineté. Le 18 octobre 1908, cet Etat devenait possession coloniale belge.
La Belgique se trouvait désormais à la tête d’un territoire quatre-vingts fois plus grand qu’elle et allait devoir relever le défi de continuer, en la développant et en l’améliorant par la mise en œuvre de moyens accrus, l’œuvre entreprise par le Roi Souverain.
A situation nouvelle, nouvelles structures. Un double réseau d’institutions, les unes installées en Belgique au sein d’un ministère des Colonies, les autres fonctionnant au Congo et dirigées par un Gouverneur Général, assureraient dorénavant l’administration de ces territoires belges, situés au cœur de l’Afrique .
Si les organes de conception et de contrôle se trouvaient à Bruxelles, les attributions dévolues à l’Administration d’Afrique n’étaient cependant pas limitées à des tâches d’exécution. Dans la sphère de son pouvoir exécutif, d’importantes prérogatives de conception et de contrôle lui avaient également été octroyées par la Charte Coloniale, appellation commune de la Loi Fondamentale sur le Gouvernement du Congo Belge, entrée en vigueur le 18 octobre 1908.
L’Administration d’Afrique comportait deux échelons : une administration centrale dirigée par le Gouverneur Général dont les services étaient établis à Léopoldville, capitale du Congo Belge et des administrations régionales placées sous l’autorité des Gouverneurs de Province.
Le Congo Belge comptait six provinces Léopoldville, Equateur, Orientale, Kivu, Katanga et Kasaï, qui avaient comme chefs lieux, Léopbldville (Kinshasa), Coquilhatville (Mbandaka), Stanleyville (Kisangani), Costermansville (Bukavu), Elisabethville (Lubumbashi) et Luluabourg.
Les provinces étaient subdivisées en districts (24 au total), administrés par un Commissaire de District aidé dans sa tâche par un ou deux Commissaires de District assistants et par un staff de conseillers techniques itinérants, mis à sa disposition par les directions générales dont ils dépendaient pour tout ce qui concernait l’agriculture, l’élevage, la santé publique et les travaux publics.
Chaque district était subdivisé en Territoires (132 au total), dirigés par un Administrateur de Territoire, aidé par des administrateurs territoriaux assistants et des agents territoriaux. Il était également assisté dans ses multiples tâches (annexe I), par des techniciens; agronomes, agents sanitaires ou vétérinaires et si l’importance du contingent mis à sa disposition le justifiait, d’un Adjudant de la Force Publique.
Enfin, chaque Territoire comprenait un nombre varié de circonscriptions indigènes :
- Chefferies traditionnelles sous l’autorité d’un Chef Coutumier et de son Conseil de Notables,
- Secteurs regroupant des entités tribales trop réduites pour être reconnues comme telles et dirigés par un Chef de Secteur congolais désigné par l’administration coloniale, assisté d’un Conseil de Secteur .
- Centres extra coutumiers, sous l’autorité d’un Chef de Centre congolais, pour les populations de provenances diverses venues s’établir à proximité du chef-lieu du Territoire ou du siège d’une importante exploitation agricole ou minière .
Le Territoire, avec les Circonscriptions Indigènes qu’il contrôlait, constituait donc la cellule administrative de base où s’exerçait l’action de la Belgique en Afrique Centrale .
Le Congo Belge comptait en outre sept villes, entités urbaines dotées d’un statut particulier et comportant chacune un certain nombre de communes.
AU RUANDA-URUNDI
Territoire sous tutelle des Nations Unies, le Ruanda-Urundi uni administrativement au Congo Belge, dont il constituait un Vice Gouvernement Général , avait une personnalité juridique distincte et un budget séparé .
L’administration du Ruanda-Urundi fonctionnait sous l’autorité d’un Vice-gouverneur-Général, dont les bureaux étaient établis à Usumbura. Le pays était divisé en deux Résidences, dirigées chacune par un Résident, assisté dans sa tâche par un staff de conseillers techniques, mis à sa disposition par le Vice-gouverneur-Général, pour tout ce qui touchait à l’agriculture, l’élevage, la santé publique et les travaux publics.
Chacune des Résidences était, à l’instar des Districts au Congo Belge, subdivisée à son tour en Territoires (10 pour le Ruanda et 9 pour l’Urundi), dirigés par un Administrateur de Territoire aidé par des Administrateurs Territoriaux assistants et des Agents territoriaux, des agronomes, des auxiliaires médicaux et vétérinaires , des agents des Travaux Publics etc.
FORMATION, RECRUTEMENT, SIGNALEMENT ET EFFECTIFS
La majorité des administrateurs territoriaux du Congo Belge et du Ruanda-Urundi ont reçu leur formation à l’Institut Universitaire des Territoires d’Outremer (INUTOM), créé en 1920 à Anvers, sous le nom d’Université Coloniale, par le Ministre des Colonies, Louis Franck.
Les étudiants y étaient admis moyennant un examen concours ainsi qu’un contingentement à l’issue de leur première année.
Portant l’uniforme, ils étaient d’emblée plongés dans un climat propice à l’exercice de leur future carrière d’Administrateur Territorial.
Administrer un territoire au Congo ou au Ruanda-Urundi impliquait une panoplie de tâches bien plus étendue qu’en métropole. Il leur faudrait non seulement maintenir l’ordre et rendre la justice, mais aussi entretenir et créer des routes, construire des ponts, des maisons, des dispensaires et des centres administratifs, planter des arbres, veiller à la santé publique en contrôlant l’hygiène des villages et en surveillant les cultures, gérer des coopératives agricoles et des paysannats, organiser le recensement des populations et collecter l’impôt.
A Anvers, on étudiait tout ce qui s’y rapportait : droit, ethnographie, économie, minéralogie histoire, préhistoire, géographie, génie civil, agronomie, sciences politiques et administratives, état civil, comptabilité, hygiène tropicale, sans oublier les langues indigènes. Toute cette formation était imprégnée d’un véritable idéal de service.
Le Ministère des Colonies recrutait aussi directement, au concours, pour être engagés au grade d’administrateur territorial assistant, des universitaires ayant suivi avec succès, un cycle d’études de quatre années au moins dans une des universités de notre pays, ainsi que des diplômés de l’enseignement secondaire supérieur, au grade d’agent territorial.
Une formation complémentaire spécifique aux fonctions qu’ils allaient être amenés à exercer en Afrique leur était donnée à l’Ecole Coloniale dépendant du Ministère des Colonies. Le cycle d’études se clôturait par un examen, lui aussi éliminatoire.
Les promotions s’obtenaient « au mérite », sur la base d’un « bulletin de signalement » annuel. Celui-ci reprenait, après une analyse détaillée des services rendus par l’intéressé durant l’année écoulée, les appréciations émises par ses supérieurs sur les points suivants : initiative, sens des responsabilités, puissance de travail et activité, connaissances professionnelles, aptitudes ou habileté professionnelles, sens social et connaissance de la langue (annexe II).
De 684 unités en 1930, les effectifs du Service Territorial au Congo Belge étaient passés à 1.104 en 1950 et à 1881 en 1960, dont près de la moitié (919) étaient des universitaires.
Au Ruanda-Urundi, le Service Territorial passa de 27 unités en 1920 à 117en 1950 et à 172 en 1960.
CONCLUSION
La Territoriale constituait l’ossature de l’administration belge d’Afrique. Elle devait mettre en pratique la politique indigène de la Belgique telle que Louis Franck, Ministre des Colonies, l’avait préconisée dès 1920, par cette phrase-clé qui n’a rien perdu de son actualité :
« En Afrique, vous n’arriverez à des résultats durables que si vous tenez compte de la nature , du caractère, des tendances et des organisations existantes, si rudimentaires soient-elles , de la population indigène.«
Annexe I Annexe II
Retrouvez les témoignages sur ce sujet dans la vidéo ″Le Service Territorial″
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